ENS LSH - Colloque - Pour une histoire critique et citoyenne, le cas de l’histoire franco-algérienne

Pour une histoire critique et citoyenne
Le cas de l’histoire franco-algérienne

20, 21, 22 juin 2006


BONIN Hubert

Institut d’études politiques, Bordeaux

Les banques et l’Algérie : mise en valeur impériale ou exploitation impérialiste ?

Session thématique « Le soubassement économique »

Mardi 20 juin 2006 - Matin - 9h45-11h45 - Salle F 05

Une fois de plus, quand on aborde le domaine de l’histoire bancaire, l’on pourrait, de façon « rétroclassique », se contenter ici d’une diatribe contre l’impérialisme bancaire et dénoncer le rôle des banques dans la construction du système d’exploitation ultramarin ; mais cet essai refusera cette facilité rhétorique et cherchera plutôt à déterminer, plus subtilement peut-être, en quoi les banques d’origine métropolitaine ont contribué ou non au processus de « développement » du pays, donc en se plaçant d’un point de vue de l’histoire économique de l’Algérie elle-même.

L’historien économiste doit en effet sans cesse s’interroger sur la capacité d’adaptation d’un mode de production à la « modernité », celle-ci passant ici par la diffusion des méthodes modernes de crédit et sur les facteurs d’accélération de ce processus de transition. Aussi cet article souhaite-t-il préciser si le mouvement long de croissance de l’économie algérienne était compatible avec cet enracinement de la banque moderne et quels relais ont ou auraient pu le favoriser. La banque moderne aurait-elle pu être configurée comme un outil de développement de toutes les couches sociales algériennes, parmi les groupes autochtones - « indigènes » - ou parmi les groupes de colons ? Or, l’histoire de l’économie algérienne a été telle que, finalement, jamais une véritable expérience de banque moderne capitaliste et privée n’a été déployée à l’échelle de l’ensemble de l’économie et de la société. Pendant la colonisation, les pesanteurs du système de conquête et d’exploitation ont empêché la diffusion de l’économie de marché moderne dans le tréfonds de la société autochtone dans la mesure où l’éclosion et le déploiement de bourgeoisies économiques locales ont été enrayés par le processus de colonisation et de colonat lui-même. Après l’indépendance, la mise en place rapide d’un capitalisme d’État centralisateur et bureaucratique a bloqué la structuration d’une réelle économie de marché dont les banques auraient pu être le support - jusqu’aux années 1990 quand une économie bancaire de marché commence à prendre corps.

Notre étude devra donc à la fois balayer le champ de l’Histoire et tenter une approche « contre-factuelle » des faits afin de déterminer si l’histoire bancaire du pays aurait pu prendre souche au sein d’une économie de marché autochtone et y rencontrer des « forces productives » capables d’alimenter une réelle clientèle bancaire. Bref, il n’entend pas s’insérer dans la croyance engagée selon laquelle la marche historique de l’économie algérienne s’orientait vers la « voie unique » du capitalisme d’État, mais il veut au contraire soupeser la diversité des voies qu’elle aurait pu suivre pour voir éclore une économie de marché - mixte ou non - au sein de laquelle les banques auraient pu jouer un rôle important.

L’Algérie face à l’économie bancaire de marché moderne

Le problème de l’Algérie est qu’elle n’a jamais connu d’économie de marché bancaire avant la fin du xxe siècle - et l’escroquerie du groupe Khalifa au début du xxie siècle n’a pas été le levier du renouveau... Les conditions déterminantes de la mise en place d’un réel système bancaire sont d’abord matérielles, avec une accumulation de capital pour procurer des fonds : le capital fourni par des capitalistes investisseurs, les fonds stables déposés par des capitalistes et investisseurs industriels, des dépôts procurés par des particuliers. Mais elles sont aussi immatérielles, psychologiques, car une « économie de la confiance » est nécessaire pour garantir la pérennité de ces fonds, pour que ces apporteurs de fonds soient relativement sûrs de la liquidité et de la solvabilité de l’établissement qu’ils fréquentent, dans la mesure où celui-ci doit assurer une fonction d’intermédiation et de « transformation » de cet argent en prêts à plus ou moins long terme.

La question préalable suppose une évaluation du marché de l’argent dans l’économie algérienne « originelle », celle en place avant le déploiement complet de l’économie coloniale ; et se pose bien entendu alors l’enjeu du « retard » de cette économie qui appartient, au milieu du xixe siècle, au bloc - énormément majoritaire - des économies encore « archaïques », c’est-à-dire peu aptes à dégager des plus-values commerciales grâce à la mise en marché d’une part substantielle des productions agricoles ou artisanales, voire « proto-industrielles ». Le transfert de techniques et de cadres bancaires par l’économie colonisatrice ne constitue en rien un signe de domination. N’oublions pas que la France elle aussi a bénéficié d’un tel transfert de capital de savoir-faire et de banquiers tout au long des siècles, des Lombards et autres Italiens des xiii-xvie siècles aux protestants suisses du xviiie siècle, avant les Juifs d’Europe centrale au tournant du xixe siècle - comme les Rothschild. La transition de la « vieille banque » à la « nouvelle banque », comme disait David Landes[1] vers l’économie bancaire moderne est un processus banal, dont l’Algérie aurait pu bénéficier elle aussi en dehors peut-être du système colonial.

C’est la question clé qui doit être abordée à cette étape de l’essai : est-ce que l’Algérie - ou ce qui en tient lieu sur le territoire maghrébin - pouvait sécréter par elle-même cette banque moderne, en un processus étalé sur plusieurs décennies - comme cela a été le cas en métropole entre 1750 et 1950 pour ce qu’on appelle « la première révolution bancaire contemporaine » ? Y avait-il un stock d’argent autochtone susceptible d’être mobilisé pour nourrir des dépôts et du capital bancaires ? Pour procurer un passif apte ensuite à alimenter un actif, c’est-à-dire des crédits ? Ne jouons pas sur le registre de la culture islamique puisque la banque islamique moderne est capable d’intermédiation, en appelant « avances sans intérêt mais avec frais de dossier » ce qui constitue de facto des prêts. C’est moins un problème de culture et de droit islamiques qu’un problème de circuits de l’argent.

En Europe, la transition s’est appuyée sur des prêteurs sans réalité bancaire, tels que des prêteurs sur gages, des usuriers[2], des notaires, des marchands créditeurs - teneurs « d’ardoises » ou praticiens de l’escompte. Il faudrait donc déterminer comment et combien, dans l’Algérie précoloniale, un marché de l’argent avait pris corps autour de prêteurs non bancaires, actifs dans les villages et les bourgades, dans les comptoirs marchands et les ports. Pour « dénoncer » un processus d’asphyxie d’une économie bancaire en germe - comme on l’a fait à propos de l’Afrique noire -, il faudrait savoir si les graines d’une telle économie avaient été semées par les autochtones. En un mot, y a-t-il jamais eu un marché de l’argent algérien, autochtone, « musulman » - pour reprendre la caractérisation du colonisateur - hors de l’emprise de l’économie coloniale ?

Une histoire « contre-factuelle » - qui imagine comment le temps se serait déroulé différemment si les cadres de cette évolution avaient été eux-mêmes différents -, devrait aussi prendre en compte l’épaisseur de l’économie marchande autochtone . Est-ce que l’économie portuaire dite « barbaresque » ou en tout cas précoloniale[3] - celle qui était en relation avec des ports italiens ou français dans la première moitié du xixe siècle - avait une envergure suffisante pour sécréter une économie du crédit locale ? une chaîne de prêts, de billets de crédit, même simple, à l’échelle des circuits de rassemblement des produits exportés ou de diffusion des produits importés ? L’on ne peut parler en effet de l’« imposition » d’un système bancaire colonial que si l’on précise si le système économique précolonial était capable de sécréter par lui-même un système bancaire plus autocentré ou du moins fixant un certain nombre de responsabilités et d’initiatives au cœur des places marchandes locales ; bref, si une bourgeoisie marchande était en émergence et capable de porter par elle-même, par ses savoir-faire et sa crédibilité financière, le fonctionnement d’un circuit d’échanges monétaires et bancaires. La même question a été posée par exemple à propos de la Russie de la première moitié du siècle, où une économie proto-industrielle et marchande a permis l’éclosion d’un système bancaire « ancien » propre à la région de Moscou - au sens large - qui a ensuite facilité la mise sur pied du type de banque « nouvelle » animé par ces marchands moscovites comme la Banque de l’Union.

La création d’une architecture bancaire et financière en Algérie et le rapport de dépendance

Il convient de s’interroger ensuite sur le lien entre le déploiement d’un système bancaire en Algérie et l’établissement du rapport de dépendance vis-à-vis de la puissance colonisatrice, tant il est vrai que le contrôle des circuits de l’argent constitue un élément clé de la domination.

La mise en place d’une banque centrale

Certes, l’économie bancaire moderne a été « surimposée » à l’économie algérienne traditionnelle ; mais la mise sur pied d’un « appareil économique d’État » est passée par la construction d’une banque centrale assurant l’intermédiation monétaire, la monétarisation du pays et la gestion des flux de trésorerie publics (administration, armée, etc.). Comme la Banque d’État du Maroc[4], la Banque de l’Indochine ou la Banque de l’Afrique occidentale - après la Banque du Sénégal -, la Banque d’Algérie[5] est devenue une institution tutélaire, exportée de métropole mais destinée à être « algérianisée » car une telle institution a pour vocation d’assumer des fonctions relativement « neutres » d’intermédiation. Elle est la clé de voûte d’un pacte à la fois statutaire et implicite de stabilité monétaire et bancaire, l’un des outils clés destinés à favoriser la construction de l’« économie de confiance » nécessaire à la pérennité des contrats noués entre tous les partenaires de l’économie d’échanges. Certes, cette banque centrale dégage des profits dont le contrôle dépend de la métropole, tout autant que son orientation est déterminée par les cadres venus de cette même métropole ; et, en cela, il s’agit bien d’une surimposition coloniale ; mais ce symbole de la « banque moderne » a aussi contribué à la mise sur pied de l’architecture monétaire dont l’Algérie indépendante a ensuite hérité.

Que se serait-il passé sans création de cette Banque de l’Algérie au sein d’une Algérie non coloniale ? Là encore, l’histoire contre-factuelle est stimulante : une telle Algérie manquait désespérément de cadres intellectuels et surtout humains pour alimenter une telle création. Mais elle aurait importé ces cadres comme d’autres pays l’ont fait : après tout, l’Empire ottoman a concédé le service public de banque d’émission et de banque centrale à un outil « impérialiste », la Banque impériale ottomane, une maison franco-anglaise plutôt dominée par les Français[6], et cela n’a pas empêché Constantinople de rester indépendante, malgré la vigoureuse influence de la Banque impériale ottomane dans la vie économique turque. De même, la Banque du Japon a importé des savoir-faire et profité de la formation de cadres au Royaume-Uni et aux États-Unis pendant l’ère Meiji et le pays a effectué par lui-même son apprentissage lui permettant d’évoluer du mode de production féodal au mode de production « moderne ». En soi et à elle seule, la mise sur pied de la Banque de l’Algérie n’a pu prédéterminer le caractère colonial de l’économie algérienne, ou le rapport de domination bancaire Nord-Sud - sauf sur la durée, quand la France a négligé au fil des décennies de former des cadres de haut niveau pour prendre le relais des expatriés et a persévéré dans le cantonnement des employés autochtones dans des postes subalternes.

L’essaimage des banques de dépôts d’origine métropolitaine

L’Algérie émergente a séduit les investisseurs bancaires à partir du moment où l’établissement de l’ordre militaire et politique et le déploiement de la colonisation rurale ont permis l’éclosion d’une économie d’échanges substantielle entre la colonie et la métropole. Plusieurs grandes banques ont peu à peu émergé, dédiées à cet outre-mer maghrébin, constitué lui aussi en cible de l’impérialisme économique ultramarin[7] : la Compagnie algérienne[8], d’abord, montée par des investisseurs proches des maisons de Haute Banque parisienne - notamment Mirabaud - et en tout cas de plus en plus placée dans leur mouvance, avec la Banque de l’union parisienne[9] comme relais parisien à partir de l’entre-deux-guerres ; puis le Crédit foncier d’Algérie et de Tunisie (CFAT)[10], qui évolue rapidement du crédit hypothécaire à la banque généraliste. La Banque de l’Algérie elle-même ajoute à ses missions de banque centrale et de banque d’émission des activités de banque commerciale, comme le pratique aussi la Banque de l’Indochine en Orient. Enfin, des excroissances des banques parisiennes surgissent, avec des succursales du Crédit lyonnais et de la Société générale. Un grand marché se constitue alors pour toutes ces maisons, et cette croissance leur permet d’atteindre une envergure certaine - puisque le CFAT et la Compagnie algérienne se situent autour du dixième rang des banques françaises en 1929 pour la collecte des dépôts et les encours de crédits - et de connaître une prospérité durable.

Elles diffusent la modernité bancaire (collecte de dépôts et gestion de l’épargne, prêts, escompte, découverts, crédits hypothécaires, crédits de campagne ou saisonniers, etc.) dans une économie coloniale de plus en plus structurée. L’économie des colons en bénéficie en direct par le biais des crédits hypothécaires, des avances sur récoltes, etc. ; les échanges commerciaux fructifient grâce aux crédits de campagne et crédits saisonniers, aux crédits sur stocks - dont les warrants -, à l’escompte des traites entre marchands, entre marchands et exportateurs, entre exportateurs et acheteurs métropolitains, entre exportateurs métropolitains et importateurs algériens, etc. Enfin, les entreprises semi-industrielles et industrielles - la Société algérienne de produits chimiques et d’engrais, par exemple, liée au CFAT - ne manquent pas d’être accompagnées dans leur croissance spécialisée par des banquiers désireux de valoriser leur trésorerie, de faciliter leur escompte, voire de placer leurs obligations et actions. Bref, ces banques sont parties prenante de l’Algérie coloniale moderne, du système économique colonial, et elles en sont même le lubrifiant essentiel, en dehors de l’autofinancement et de la capacité d’épargne de ces colons, marchands et entreprises.

Un « bloc » reliant banque et grande - et moyenne - entreprise s’est ainsi constitué : la banque euro-algérienne assure la gestion des disponibilités de trésorerie, le financement du capital circulant par des découverts, le financement d’emprunts à court et moyen termes, le placement de titres au sein de la clientèle d’investisseurs privés ou institutionnels. M. Lazar-Gharbi l’a montré à propos des chemins de fer à la frontière entre l’Algérie et la Tunisie[11] (le Bône-Guelma) ; P. Guillen à propos du Maroc[12] et D. Lefeuvre[13] à propos de l’économie moderne algérienne, ont eux aussi contribué à cette histoire mobilière et financière.

Une économie bancaire dans un système économique colonial

Il est évident que ces banques œuvrent au service de l’économie coloniale et qu’elles profitent peu, dans leur action directe, aux populations autochtones. Dans l’agriculture, elles agissent en liaison étroite avec le monde du colonat, des villages de peuplement d’origine européenne, des contrées où la « mise en valeur » est passée par une colonisation foncière[14]. C’est qu’un banquier exige des garanties et que seuls ces colons sont aptes à fournir les gages nécessaires ; en effet, se pose le problème du statut juridique des terres collectives, qu’elles soient communales ou religieuses (habous), et même du statut de la propriété individuelle des paysans locaux, alors que la notion d’« individu » agissant en propre au regard du droit manque quelque peu de vigueur dans ces territoires ultramarins ; ajoutons que le Code de l’indigénat[15] limite sensiblement la liberté de contracter au sein de la population de souche. Le crédit agricole profite ainsi surtout aux colons, malgré les tentatives de lancer l’institution du Crédit agricole mutuel dans l’entre-deux-guerres dans la logique de l’« esprit républicain » qui avait profité à « la France des petits » depuis les réformes des années 1890. L’on peut suggérer aussi que la prégnance du droit coutumier précolonial, sinon « tribal » ou clanique, du moins villageois, enraye la diffusion des formes modernes du crédit gagé. Les historiens du Maghreb débattent de la fameuse « déstructuration des anciens cadres sociaux », de la « détribalisation » et de la lenteur de la structuration de la conscience individualiste libre ; mais ces débats ont pourtant quelque valeur économique puisque les méthodes bancaires de l’époque reposent sur le seul « crédit personnel » et ne peuvent se couler dans le moule des cadres sociaux-mentaux africains fondés davantage sur la notion de collectif économique ou de gens à l’antique.

Il est clair que le plafonnement à une centaine d’agences de chacun des réseaux des grandes banques (CFAT, Compagnie algérienne) cantonne le crédit dans les bourgades principales et les quartiers des grandes villes. La pénétration en profondeur dans le tissu des couches sociales ou socioprofessionnelles autochtones n’est guère possible en Algérie car ces contrées manquent d’un relais entre l’économie locale et l’économie moderne. Les petits artisans et commerçants autochtones, voire les toutes petites entreprises émergentes, conservent un profil rural ou préindustriel - on dirait en France d’« Ancien Régime » -, à l’image de l’économie rurale dominant entre les années 1850 et les années 1940 sur le pourtour de la Méditerranée. Ces couches socioprofessionnelles manquent de la capacité de procurer des gages et des garanties à d’éventuels prêteurs. Et c’est là qu’on peut se poser la question de l’absence des « intermédiaires » qui ont joué un rôle efficace dans d’autres parties des empires coloniaux ou dans des territoires d’économie dominée, notamment en Asie : en Chine, voire dans les quartiers chinois de l’Indochine (Cholon), la Banque de l’Indochine - tout comme la Hong-Kong & Shanghai Bank - a pu compter sur les compradores[16], ces Chinois qui engagent leur crédit personnel et négocient les affaires, en « sous-traitants » ou « façonniers » de l’intermédiation bancaire, pour pénétrer en relative profondeur dans le tissu de la petite entreprise autochtone ; en Inde, les maisons britanniques ont pu s’appuyer sur des intermédiaires équivalents, les reddys. Or, l’Algérie a manqué désespérément de tels outils agissant en leviers du crédit bancaire. Était-ce dû à la profonde inégalité entre le monde rural colonial et le monde rural autochtone ? On sait, en effet, que le revenu individuel moyen de l’agriculteur européen était en 1954 trente-cinq fois plus élevé que celui de l’agriculteur autochtone et que le revenu moyen de la famille européenne dépassait de huit fois celui de la famille musulmane[17] tant le niveau de vie rural était bas[18] et l’est resté, malgré sa progression et la diffusion d’outils de commercialisation et de monétarisation dans nombre de foyers villageois pendant la colonisation.

Est-ce le niveau de développement de l’économie et de la société qui n’était pas encore suffisamment élevé pendant la seconde moitié du xixe siècle pour permettre l’éclosion de cette (relative) « classe moyenne » ? N’y avait-il pas en Algérie une strate suffisamment épaisse de petits marchands locaux aptes à pratiquer l’usure, le crédit gagé, au profit de leurs concitoyens petits producteurs ruraux et artisanaux, avant eux-mêmes de se refinancer auprès des banquiers ? Pourquoi ne pas évoquer une « classe marchande » assurant une sorte de « révolution (petite) bourgeoise » selon les schémas du marxisme historien des années 1960 ? Après tout, de telles strates marchandes existaient dans plusieurs pays d’Afrique noire (les Bamilékés du Cameroun, les marchands animés par les réseaux Mourides au Sénégal, « Mama Benz »[19], etc.) et, surtout, la Kabylie et le monde berbère sont devenus réputés pour entretenir une « culture marchande » spécifique. L’historien de la banque française - donc de l’économie et de la société française - doit avouer, à cette étape de sa réflexion, sa perplexité devant de telles considérations et, surtout, son ignorance quant à la structure sociologique de l’Algérie autochtone durant le processus de colonisation - d’où son impossibilité de dépasser le registre du questionnement pour déboucher sur des hypothèses et des réponses.

Or, peu avant le départ des Français, il semble que « les classes moyennes » constituent une strate fort mince ; les données procurées par l’historien Ahmed Henni[20] et par le Rapport Maspétiol de 1955 permettent d’en dessiner un périmètre fort limité. Certes,

cette minorité paysanne s’active pour le marché : elle promeut un nouveau type de travail agricole visant à maximiser un volume financier et une rentabilité financière [...]. Ce passage à un statut de paysan moyen engagé dans l’économie monétaire et moderne concerne davantage les petits paysans que les propriétaires moyens traditionnels qui, eux, semblent frappés de conservatisme. C’est ce que montrent également les enquêtes effectuées dans les périmètres irrigués où s’exercent l’agrumiculture et le maraîchage.[21]

Mais A. Henni estime que, membres de cette « classe moyenne » paysanne, « la catégorie “moderne” des fermiers, bien que très minoritaire, fait plus que doubler entre 1914 et 1936, passant de 49 000 à 108 000 »[22], soit une quantité bien modeste. Le Rapport Maspetiol est quant à lui pessimiste quant à l’évaluation d’une telle classe moyenne dans le monde non paysan. Cité par la thèse de D. Lefeuvre[23], il recense seulement 560 000 Musulmans un peu aisés, dont 50 000 répertoriés parmi les classes moyennes et le solde parmi les « petits » (artisans, commerçants, salariés). Mais ces strates dites « moyennes », plus proches d’une petite bourgeoisie ou d’une classe populaire aisée, étaient-elles bancarisées ? Disposaient-elles de liquidités à placer en dépôts bancaires ou sur un compte de Caisse d’épargne (postale) ou de Crédit agricole ? L’on peut en douter, mais des études plus fines manquent à coup sûr...

L’on peut penser que nulle fatalité ne pesait a priori sur l’Algérie. À supposer que celle-ci soit restée indépendante ou autonome, elle aurait pu connaître la même évolution que l’Égypte du protectorat[24], où des banques créées par des autochtones peu ou prou nationalistes et par des bourgeoisies marchandes ou foncières ont pris corps, telle que la banque Misr. La structuration éventuelle d’un État algérien lui aurait peut-être permis d’effectuer l’algérianisation de sa banque d’émission et banque centrale - au cas où l’Algérie en aurait institué une par le biais d’une concession - tout comme le réalise la Turquie au milieu des années 1920 en laissant la Banque impériale ottomane devenir une simple banque commerciale. L’on peut aussi imaginer qu’une lente émergence d’une couche marchande autochtone aurait pu déboucher sur une économie bancaire modeste mais active, sur un système de crédit lié au négoce, en suivant en cela le processus historique qui s’est déployé par exemple en France[25] dans les années 1770-1840 ou en Angleterre - avec les merchant banks londoniennes mais aussi régionales et locales. Pourquoi la « révolution marchande » chère aux marxistes des années 1960 n’a-t-elle pas pris corps en Algérie ? La cause en est-elle la même que celle avancée par Samir Amin à propos de l’Afrique noire, à savoir le rapport de domination coloniale qui aurait abouti à l’éviction des acteurs locaux d’envergure au profit des maisons d’origine européenne ? Pourtant, dans la Tunisie voisine, l’appareil commercial local résiste à l’emprise européenne sur de nombreuses places marchandes et, dans la clientèle du CFAT ou du Comptoir national d’escompte de Paris (CNEP)[26] figurent nombre de noms d’origine musulmane, des petits marchands qui possèdent des silos à grains et à huile d’olive et qui préservent leur fonction de relais ou d’intermédiaire au sein de l’économie des denrées agricoles exportables. Certes, les exportations de vins et de céréales pèsent l’essentiel - avec respectivement 62 et 82 des 336 millions d’exportations de denrées agricoles en 1907 -, et constituent le cœur de l’économie moderne du colonat rural. D’ailleurs, par exemple, la Compagnie algérienne se munit de docks et d’entrepôts qui lui permettent de multiplier ses avances sur nantissement - sur le principe des warrants -, gagées par les denrées en stock sous son contrôle :

L’accroissement de la production des céréales nous a décidés à donner une extension plus grande à l’exploitation de magasins généraux. Nous faisons ainsi une œuvre utile au pays puisque nos docks permettent aux colons de conserver leurs récoltes en attendant des cours favorables pour les vendre.

Des magasins généraux sont ainsi déployés à Blida, Bordj Bou Arreridj, Mascara, Saida, Saint-Arnaud, Sétif, Sidi Bel Abbès, Souk Ahras et Tiaret dès la première décennie du xxe siècle.

Mais ne peut-on concevoir que de fortes exportations issues du monde autochtones soient aussi effectuées, avec de grosses cargaisons de laines, d’ovins. En 1910, les ventes de céréales (24 millions), d’huiles (11 millions) et de bestiaux (4 millions) animent une fraction des 493 millions de francs des exportations, loin derrière le vin cette année-là, avec 106 millions. Cela a dû par conséquent contribuer à l’animation de marchés aux bestiaux, d’un négoce, de réseaux d’intermédiaires comme les maquignons sur les marchés métropolitains. On décèlerait donc ici des embryons d’économie d’échanges et de crédit qui seraient bel et bien susceptibles de soutenir une insertion dans l’économie bancaire euro-algérienne. La difficulté réside dans la faiblesse de la place laissée aux producteurs autochtones dans le système de production euro-africain. Une estimation prétend que seuls trois dizaines de milliers de musulmans seraient intégrés dans l’« agriculture commerciale », ne serait-ce qu’en raison des obstacles posés à l’accès des villageois algériens à l’irrigation et de la faible envergure des exploitations individuelles, voire du poids du métayage ou l’importance des prélèvements fiscaux, toutes causes qui limitent la capacité d’autofinancement, l’aptitude à la monétarisation et la production de « surplus » monétaires.

Une histoire contre-factuelle devrait donc prendre en compte une potentialité éventuelle de l’économie algérienne à sécréter de telles strates de « bourgeoisie marchande » et plus tard de bourgeoisie du crédit, donc de petits banquiers autochtones. Après tout, la « civilisation du boulier » a longtemps dominé l’économie de la marchandise et du crédit en Asie et au Proche-Orient, en plein cœur des échanges de devises et des remises de lettres de change. Ce ne sont pas les différences de niveau technique, de comptabilité, de méthodes de décompte, qui expliquent le « retard » dans la conception d’une économie marchande et bancaire. Il faudrait donc aborder le thème du crédit en Algérie en fonction d’une analyse des circuits de l’argent au niveau des clans ruraux et citadins, des villages, et des bourgades et déterminer si un mode de production « moderne » aurait pu se cristalliser au niveau de l’économie de l’argent au cas où des rapports de domination « écrasants » n’auraient pas perturbé son ascension. Il faudrait déterminer dans le même temps si c’est bel et bien la colonisation qui a disloqué ce processus d’émergence d’une part, ou si des spécificités locales n’ont pas enrayé celui-ci, par exemple au niveau des mentalités, du mode de production villageois, des rapports sociaux ruraux, voire des contraintes de l’Islam, d’autre part.

Il faut en effet oser aborder le problème du lien entre religion et crédit. L’Algérie n’a pas vu éclore un système de crédit influencé par un esprit confessionnel comme cela a été le cas dans l’Europe germanique (banques Raiffeisen) et dans certaines régions françaises (Crédit mutuel, certaines caisses du Crédit agricole mutuel[27]). Or, l’islam n’est évidemment pas incompatible avec des réseaux de négoce (huiles, céréales, bestiaux) et de banque, comme l’indiquent les réseaux des Mourides au Sénégal. Il serait bien entendu anachronique de prétendre se demander pourquoi un crédit de type confessionnel n’a pas surgi dans l’économie précoloniale du Maghreb ou au sein même de l’économie coloniale, ou pourquoi des systèmes de « microcrédit » ne s’y sont pas développés, sur le modèle des « tontines » tant pratiquées en Asie et en Afrique noire. Après tout, le microcrédit y prospère de plus en plus depuis les années 1990, en particulier au Maroc, et il commence à éclore en Algérie et au Maroc au tournant du xxi siècle - avec, par exemple, le parrainage de l’organisme parisien Planète Finance.

C’est précisément cette absence d’une armature de négoce et de crédit autochtone qui explique le triomphe des banques d’origine métropolitaine, leur prospérité et leurs importants profits. En effet, alors que nombre de pays d’Europe occidentale était couvert de myriades de « banques locales », ces petites banques actives sur le marché d’une bourgade, que la banque locale est restée à peu près durablement, des années 1860 aux années 1930 - le cœur de la vie économique dans nombre de contrées - dont les fameux « districts » -, et que cette économie bancaire décentralisée a côtoyé efficacement l’économie des grandes banques et de leurs réseaux d’agences, en stimulant une concurrence saine, l’Algérie a manqué de ce dualisme, contrairement à l’Inde, par exemple. C’est ce déséquilibre entre la faible envergure de l’économie autochtone et la forte économie coloniale qui explique le rythme soutenu de la croissance de la demi-douzaine de banques parisiennes actives en Algérie, leur capacité d’autofinancement et la mobilisation d’une partie de celle-ci pour déployer des réseaux dans les places métropolitaines entretenant des relations étroites avec le Maghreb, en une sorte de chaîne ou de « filière » reliant l’outre-mer et la métropole en cumulant donc les prélèvements de commissions et de charges d’intérêts, pour édifier une économie impériale qui a pu passer pour un symbole d’une certaine forme d’impérialisme économique.

Conclusion

Si le paradigme d’un système de surexploitation impérialiste porté par les grandes banques métropolitaines et le sentiment de la nécessité d’un capitalisme d’État national ont toujours cours, nous pensons que de tels systèmes n’étaient pas inéluctables et qu’une part devrait être préservée à une voie différente dans l’histoire bancaire - et économique - algérienne. Une économie de marché respectant l’émergence de « classes moyennes » autochtones aurait pu prendre corps dans le cadre d’une autonomie économique plus large, voire au sein d’une Algérie suivant sa propre voie, un peu comme l’Égypte sous protectorat anglais ou l’Empire ottoman. Une histoire contre-factuelle aurait pu imaginer une diffusion du crédit « moderne » au sein d’une agriculture de plus en plus extravertie et « commerciale » permettant de créer une capacité d’épargne locale, mais discuter de cette possibilité est évidemment hypothétique. Si l’on peut penser que rien n’était joué avant la cristallisation du colonat rural à la fin du xixe siècle, le système productif algérien se fige désormais sans possibilité de retour en arrière. Le dualisme devient trop inégalitaire, la classe moyenne marchande musulmane est bien trop mince - contrairement à la situation tunisienne, voire marocaine -, ce qui bloque la pénétration de l’économie de marché bancaire dans le monde autochtone des campagnes ou des bourgades. Nous ne prétendons pas qu’une autre voie aurait été possible et que l’Histoire pouvait être infléchie, mais nous voulions montrer que la banque n’est pas en soi « diabolique » ou « malfaisante ». Elle ne peut déployer ses qualités - si l’on croit comme les saint-simoniens aux vertus bienfaisantes du crédit - que si la structure économique et sociale de son champ de déploiement est suffisamment flexible, ouverte, dynamique, souple. À elle seule, la banque ne peut renverser les rigidités d’un système productif et d’une société divisée, et encore moins être isolée du « système économique de colonisation ».


[1] David Landes, « Vieille banque et banque nouvelle. La révolution financière du e siècle ». Revue d’histoire moderne et contemporaine, juillet-septembre 1956.

[2] Voir dans un autre pays méditerranéen : Georges Dertilis (dir.), Banquiers, usuriers et paysans. Réseaux de crédit et stratégies du capital en Grèce, 1780-1930. Paris : Fondation des Treilles, La Découverte, 1988.

[3] Voir Marcel Émerit, L’Algérie au temps d’Abd el Kader. Alger : Éditions de l’Empire ; réédition, Paris : Bouchêne, 1999. Lucette Valensi, Le Maghreb avant la prise d’Alger, 1790-1830. Paris : Flammarion, 1969.

[4] A. Reynier, La Banque d’État du Maroc et les banques d’émission coloniales. Casablanca : La Presse marocaine, 1926.

[5] Voir G. Duménil, La Banque d’Algérie et son rôle économique et financier. Paris : De Boccard, 1927. Ernest Picard, La monnaie et le crédit en Algérie depuis 1830. Alger : Collection du centenaire de l’Algérie ; Paris : Jules Carbonnel et Plon, 1930.

[6] Voir Jacques Thobie, Intérêts et impérialisme français dans l’empire ottoman. Paris : Publications de la Sorbonne, 1977. Marc Autheman, La Banque impériale ottomane. Paris : Publications du Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 1996. Jean Bouvier et René Girault, L’impérialisme français d’avant 1914. Paris : Mouton, 1976.

[7] H. Bonin, « L’outre-mer, marché pour la banque commerciale (1876-1985) ? ». In J. Marseille (dir.), La France et l’outre-mer (actes du colloque de novembre 1996 ; Les relations économiques et financières entre la France et la France d’outre-mer). Paris : Publications du Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 1998, p. 437-483.

[8] H. Bonin, « Une histoire bancaire transméditerranéenne : la Compagnie algérienne, d’un ultime apogée au repli (1945-1970) ». In D. Lefeuvre (et al. dir.), La Guerre d’Algérie au miroir des décolonisations françaises (en l’honneur de Charles-Robert Ageron). Paris : Publications de la Société française d’histoire d’outre-mer, 2000, réédition 2005, p. 151-176. Id., « La Compagnie algérienne, levier de la colonisation et prospère grâce à elle (1865-1939) ». Revue française d’histoire d’outre-mer, second semestre 2000, n° 328-329, p. 209-230.

[9] H. Bonin, La Banque de l’union parisienne. Histoire de la deuxième banque d’affaires française (1874/1904-1974). Paris, Plage, 2001.

[10] H. Bonin, Un outre-mer bancaire méditerranéen. Histoire du Crédit foncier d’Algérie et de Tunisie (1880-1997). Paris : Publications de la Société française d’histoire d’outre-mer, 2004. Id., « Une banque française maître d’œuvre d’un outre-mer levantin : le Crédit foncier d’Algérie et de Tunisie, du Maghreb à la Méditerranée orientale (1919-1970) ». Outre-Mers. Revue d’histoire, premier semestre 2004, t. 91, n° 342-343, p. 239-272.

[11] Mohamed-Lazhar Gharbi, Impérialisme et réformisme au Maghreb. Histoire d’un chemin de fer algéro-tunisien. Tunis : Cérès édition, 1994. Voir aussi Terushi Hara, « Les investissements ferroviaires en Algérie au xixe siècle ». Revue d’histoire économique et sociale, 1976, vol. 54, n° 2.

[12] Pierre Guillen, Les emprunts marocains, 1901-1904. Paris : Publications de la Sorbonne, 1972.

[13] Daniel Lefeuvre, Chère Algérie, 1930-1962. Paris : Publications de la Société française d’histoire d’outre-mer, 1997.

[14] Xavier Yacono, La colonisation des plaines du Chérif. Alger : Imprimerie Imbert, 1956. Julien Franc, La colonisation de la Mitidja. Paris : Librairie ancienne Honoré Champion, 1928. Voir aussi Jean Poncet, La colonisation et l’agriculture européennes en Tunisie depuis 1881. Paris - La Haye : Mouton, 1961. Guy Pervillé, « Une terre possédée et cultivée par des Français ? ». Pour une histoire de la Guerre d’Algérie. Paris : Picard, p. 29-35. Ahmed Henni, La colonisation agraire et le sous-développement en Algérie, 1830-1954. Alger : Société nationale d’édition et de diffusion, 1982.

[15] Voir Victor Piquet, Les réformes en Algérie et le statut des indigènes. Paris : E. Larose, 1919.

[16] H. Bonin, « Les banquiers français à Shanghai dans les années 1860-1940 ». Le Paris de l’Orient. Présence française à Shanghai, 1849-1946. Boulogne-sur-Seine : Musée Albert Kahn, 2002, p. 113-119. Id., « L’activité des banques françaises dans l’Asie du Pacifique des années 1860 aux années 1940 ». Revue française d’histoire d’outre-mer, 1994, t. 81, n° 305, p. 401-425. Id., « The French banks in the Pacific area (1860-1945) ». In Olive Checkland, Shizuya Nishimura et Norio Tamaki (dir.), Pacific Banking (1859-1959). East Meets West. Londres : MacMillan, New York : St. Martin’s Press, 1994, p. 61-74.

[17] H. Bonin, CFAT. Op. cit., p. 206, note 67.

[18] Voir André Nouschi, Enquête sur le niveau de vie des populations rurales constantinoises de la conquête jusqu’en 1919. Paris PUF, 1961. Pour comparaison, voir L. Valensi, Fellahs tunisiens. L’économie rurale et la vie des campagnes aux xviiie et xixe siècles. Paris - La Haye : Mouton, 1977. André Nouschi, « La Crise au Maghreb : remarques de méthode sur la vie rurale de 1929 à 1936 ». In Catherine Coquery-Vidrovitch (et alii, dir.), L’Afrique et la Crise, 1924-1938. Paris : Publications de la SFHOM, tome 63, 1976, p. 425-440. Robert Tinthoin, Colonisation et évolution des genres de vie dans la région ouest d’Oran de 1830 à 1885. Oran : Imprimerie L. Foulque, 1947. Xavier Yacono, Les bureaux arabes et l’évolution des genres de vie indigènes dans l’Ouest du Tell indigène. Paris : Larose, 1953. Voir J. Mélia, Le triste sort des indigènes musulmans d’Algérie. Paris : Mercure de France, 1935. Voir enfin les pages 61-71 dans Daniel Lefeuvre, Chère Algérie, 1930-1962. Paris : Publications de la Société française d’histoire d’outre-mer, 1997.

[19] Voir par exemple Catherine Coquery-Vidrovitch, « African businesswomen in colonial and postcolonial Africa : A comparative survey ». In Alusine Jalloh et Toyin Galola (dir.), Black Business and Economic Power. Rochester : Rochester University Press, 2002, p. 199-211. Jean-Louis Amselle, Les négociants de la savane. Paris : Anthropos, 1977.

[20] Ahmed Henni, « La naissance d’une classe moyenne paysanne musulmane après la Première Guerre mondiale ». Revue française d’histoire d’outre-mer, 1996, t. 83, n° 311, p. 47-63.

[21Ibid., p. 55.

[22Ibid., p. 57.

[23] Daniel Lefeuvre, Chère Algérie, op. cit., p. 68-69.

[24] Voir Samir Saul, La France et l’Égypte de 1882 à 1914. Intérêts économiques et implications politiques. Paris : Publications du CHEFF, 1997. Abd al Azime Ramadan, « Un demi-siècle de lutte de la bourgeoisie égyptienne pour la fondation de la banque Misr » (en égyptien). Al-Katib, avril 1971, vol. 11, n° 121, p. 170-184.

[25] Voir les ouvrages clés des historiens de la banque Bertrand Gille et Louis Bergeron.

[26] H. Bonin, « Le Comptoir national d’escompte de Paris, une banque impériale (1848-1940) ». Revue française d’histoire d’outre-mer, 1991, t. 78, n° 293, p. 477-497.

[27] Pour comparaison, voir « Le problème du Crédit agricole en Tunisie ». In Mohamed Lazhar Gharbi, Le capital français à la traîne. Ébauche d’un réseau bancaire au Maghreb colonial, 1847-1914. Tunis : Université de la Manouba, 2003, [en fait surtout consacré à la Tunisie].


Citer cet article :
Hubert Bonin, « Les banques et l’Algérie coloniale : mise en valeur impériale ou exploitation impérialiste ? », colloque Pour une histoire critique et citoyenne. Le cas de l’histoire franco-algérienne, 20-22 juin 2006, Lyon, ENS LSH, 2007, http://ens-web3.ens-lsh.fr/colloques/france-algerie/communication.php3?id_article=201