ENS LSH - Colloque - Pour une histoire critique et citoyenne, le cas de l’histoire franco-algérienne

Pour une histoire critique et citoyenne
Le cas de l’histoire franco-algérienne

20, 21, 22 juin 2006


MÉDARD Frédéric

Université Paul-Valéry Montpellier III

Le Sahara , 1957-1962 : mutation administrative, économique et sociologique ?

Session thématique « France, guerre d’Algérie et enjeux internationaux »

Mercredi 21 juin 2006 - Matin - 9h-11h - Salle F 05

Le 22 avril 1900, des colonnes françaises venues d’Algérie, du Sénégal et du Congo tuaient à la bataille de Koussouri le sultan Rabah, souverain du dernier État esclavagiste implanté aux confins du lac Tchad[1]. Deux ans plus tard, le 7 mai 1902, le lieutenant Cotonest défaisait 300 Touaregs au combat de Gara-du-Tit. Cette nouvelle victoire instaura la paix entre les différentes tribus et la loi du 24 décembre 1902 consacra officiellement l’incorporation du Sahara à la France. Mais les territoires sahariens n’étaient pas intégrés aux départements algériens et un décret du 30 décembre 1903 leur attribuait un budget distinct, relevant du ministère des Colonies[2]. Avant même que le Sahara ne soit complètement soumis à la France[3], ces succès militaires marquaient surtout une rupture pour l’économie saharienne : le commerce des esclaves noirs, qui depuis des siècles constituaient la main-d’œuvre des oasis se tarit soudainement. L’entretien indispensable des canaux d’irrigation des palmeraies n’étant plus assuré, ces milieux fragiles et instables furent menacés d’ensablement. Des oasis disparurent. Les Sahariens qui ne prirent pas le chemin de l’Algérie se regroupèrent dans les oasis qui résistaient aux sables, comme à Béni-Abbès où, entre 1900 et 1950, le nombre d’habitants fut multiplié par six, passant de 200 à 1 200[4]. Dans le même temps, l’ensemble de la population saharienne s’accrut sensiblement en raison d’un taux de natalité très élevé, alors que les progrès de l’hygiène et de l’introduction de la médecine moderne, faisaient reculer la mortalité pendant la première moitié du xxe siècle.

Cette poussée démographique entraîna peu à peu, aux abords des oasis, la concentration d’un sous-prolétariat de sédentaires[5] et de semi-nomades subsistant grâce à l’élevage de chèvres et de moutons, quand cette activité était possible ou que le cheptel n’était pas décimé par les maladies endémiques. Surtout, l’agriculture saharienne, agriculture de subsistance, basée sur les cultures légumineuses ou maraîchères, les arbres fruitiers ou les palmiers dattiers, devint incapable de satisfaire les besoins croissants des populations. En raison de la rareté de l’eau, la superficie des surfaces irriguées augmentait faiblement. Le rendement d’un palmier dattier ne dépassait pas 16 kilogrammes de fruits par an. Certes, dès le début de la pénétration française, les militaires avaient prospecté des points d’eau qui jalonnaient les points stratégiques. Les colons qui, après 1880, s’étaient implantés dans le Nord-Est du Sahara, entre Biskra et Touggourt, avaient également créé des puits pour la culture du palmier dattier. À leur suite, les officiers des Affaires sahariennes cherchèrent à pourvoir en eau les populations dont ils avaient désormais la charge dans le Tidikelt, le Touat et le Gourara[6]. Ces efforts eurent des effets limités car les crédits manquaient. Les hydrauliciens Jacques Savornin en 1938, puis Marcel Gautier dix ans plus tard, avaient conclu à l’existence théorique d’une immense nappe d’eau souterraine dans la couche albienne[7]. Savornin évaluait à 24 000 milliards de mètres cubes la contenance de cette nappe. Mais les forages profonds coûtaient cher pour des résultats aléatoires. La direction de l’hydraulique de l’Algérie préféra aménager les grands chotts. Ce choix ne fut pas pertinent car les travaux s’avérèrent finalement onéreux et la ressource insuffisante pour améliorer le rendement des sols soit trop salins, soit démunis d’éléments organiques. Le niveau de la production agricole demeurait insuffisant pour satisfaire les besoins du Sahara qui comptait 430 000 habitants selon un recensement de 1954[8] et une natalité soutenue de 35 pour 1 000. Si bien qu’en 1957, un rapport mit en évidence que la population y était mal nourrie, voire sous-alimentée[9].

L’année 1957 fut justement marquée par d’importants changements pour les régions sahariennes. Ainsi, le 10 janvier vit la création d’une Organisation commune des régions sahariennes (OCRS), personne de droit moral dotée de l’autonomie financière, ayant pour mission de réglementer, diriger et contrôler les politiques tendant à « la mise en valeur, le développement économique et la promotion sociale »[10] de ces zones désertiques. Le 13 juin, un ministère du Sahara fut créé et confié à Max Lejeune[11]. Le nouveau ministre exerçait en outre les fonctions de délégué général de l’OCRS. Puis le 7 août 1957, les quatre « Territoires du Sud Algérien », jusque-là toujours considérés « territoires militaires »[12], furent érigés en deux départements sahariens des « Oasis » et de la « Saoura », entités administratives identiques aux départements métropolitains[13]. Cette institutionnalisation du Sahara, tardive[14], était destinée à en sauvegarder l’unité et à assurer son développement économique à un moment où l’Algérie était en proie à une insurrection armée. Elle était la synthèse de plusieurs théories formulées dès le début des années 1950, lorsque le statut des territoires sahariens, administrés par les gouverneurs généraux de l’Algérie, de l’Afrique occidentale française et de l’Afrique équatoriale française était apparu inadapté. L’objectif était de renforcer l’intégration du Sahara au sein de l’Union française, mais également de permettre une mise en exploitation des richesses minérales dont Eiric Labonne avait, dès les années 1930, soutenu l’existence[15]. En 1951, l’ingénieur Émile Bélime fut le premier à suggérer que Paris administre directement le Sahara et trouva appui dans les milieux parlementaires. En 1953, Alduy déposa devant l’Assemblée de l’Union française un projet de loi tendant à instituer un organisme pour administrer l’ensemble des territoires sahariens. L’idée fut reprise par Pierre July et Pierre Cornet le 27 mars 1955. Le projet n’ayant pas plus abouti que le précédent, Pierre July, avec le renfort des députés Paul Reynaud et Edgar Faure déposa, le 9 mars 1956 sur le bureau de l’Assemblée nationale, une nouvelle proposition de loi visant à faire du Sahara trois nouveaux départements à statut particulier. Le texte qui fut finalement adopté avec l’appui de Félix Houphouët-Boigny, était un compromis des différentes propositions.

Le nouveau cadre économique et social créé par l’OCRS, et celui politique des deux départements, intervenaient alors que l’année 1956 avait révélé d’importants gisements d’hydrocarbures à Edjeleh et Hassi-Messaoud[16]. L’exploitation de ces richesses laissait entrevoir, selon les autorités françaises, un développement rapide du Sahara, devenu « province pétrolifère »[17] et érigé en plaque tournante d’une « Eurafrique », constituée par « un axe géopolitique et géostratégique » allant de Paris à Brazzaville via Alger et Colomb-Béchar. Cet argumentaire avait en outre l’intérêt de justifier l’effort militaire en Algérie[18]. Selon un sondage de l’Institut français d’opinion publique (IFOP) réalisé en septembre 1957, 80 % des Français de métropole étaient convaincus que le Sahara représentait « une source de richesse importante qui pourrait améliorer la situation économique et financière de la France »[19]. Cette attente était compréhensible à un moment où la balance commerciale française avait cumulé 451,8 milliards d’anciens francs de déficit entre 1953 et 1955 et que ce résultat était essentiellement dû à l’achat de minerais et d’énergie qui constituaient 50 % des importations globales françaises[20]. Mais, avant de retirer un bénéfice de ses départements sahariens, la France devait y investir des sommes considérables. Pour cette mise en valeur, les pouvoirs publics pouvaient s’appuyer ou tout au moins s’inspirer d’initiatives antérieures à l’OCRS. En effet, le 24 juin 1950, le gouvernement de Georges Bidault avait formé, à l’instigation d’Eiric Labonne, un « comité d’étude des zones d’organisation industrielle de l’Union française » dont les travaux aboutirent à la création de deux Zones d’organisation industrielle en Afrique (ZOIA). Ces structures devaient concentrer les moyens de développement près des gisements miniers et énergétiques[21]. Depuis un an la France s’employait à déterminer la structure géologique du Sahara permettant de tenter le premier forage exploratoire près de Berriane, dans le M’Zab en 1952. En 1953, les quatre premières compagnies pétrolières recevaient leur permis de recherches. En 1954, le premier forage en profondeur réalisé dans le djebel Berga révélait un important gisement de gaz. En janvier 1956, les investissements d’exploitation n’atteignaient que la modeste somme de 2 milliards d’anciens francs[22] et si vingt tours de forage étaient en fonction à la fin de l’année, le Sahara demeurait encore el khela[23]. Si bien qu’en 1957, la nouvelle OCRS devait d’abord commencer par consacrer tous ses efforts à la mise en place de l’infrastructure indispensable à l’exploitation du sous-sol saharien, avant que les ressources financières puissent assurer la promotion sociale des populations sahariennes. Le seul système d’évacuation de la production d’Hassi-Messaoud allait nécessiter 63 milliards d’anciens francs d’investissements. Celui d’Edjeleh, un oléoduc reliant In-Amenas à La Skirah dans le golfe de Gabbès, qui ne fut achevé qu’en octobre 1960, allait demander encore 55 milliards d’anciens francs.

Encore s’agissait-il des seuls investissements nécessaires à l’exploitation de la manne pétrolière. Or l’OCRS se fixait des objectifs bien plus ambitieux puisque les premiers bénéficiaires de son œuvre devaient être les populations sahariennes. Il convenait donc d’investir dans les équipements comme les voies de communication terrestres, l’aéronautique, les télécommunications, indispensables au développement économique. Le 31 janvier 1958 furent donc créées à cet effet des sociétés algériennes de développement ayant pour objectif de financer l’appareil de transport mais également l’hôtellerie et les petits travaux d’infrastructure légère. En 1959, le Bureau d’organisation des ensembles industriels africains, créé en 1952 pour gérer et financer les ZOIA, fut transformé en Bureau des investissements en Afrique (BIA). Cet établissement financier, dont la compétence était plus particulièrement concentrée sur le Sahara, pouvait prendre des participations de l’État dans les sociétés qu’il créait ou contribuait à créer en accordant des prêts, des garanties ou en contractant des emprunts. D’autre part, suite à une ordonnance de décembre 1958[24], la convention du 4 mars 1959 apporta le concours de deux sociétés sahariennes de développement, la Compagnie française du Sahara[25] (CFS) et la Société pour le développement des régions sahariennes[26] (SDRS). Pour mobiliser les fonds indispensables aux opérations de développement du Sahara, le gouvernement calqua leur organisation sur les sociétés de financement pour le développement régional que le décret de juin 1955 avait mis en place au profit des vingt-sept régions économiques métropolitaines[27]. En outre, un décret du 31 décembre 1959 institua une Caisse saharienne de solidarité. Les montages financiers produits par ces différentes structures ainsi que les subventions accordées devaient permettre d’assumer des charges aussi diverses que les dépenses sociales pour l’amélioration de l’urbanisme et de l’habitat, pour la création des équipements sociaux, pour assurer l’électrification ou renforcer l’hydraulique.

Rompant avec le trafic caravanier ancestral, l’amélioration du réseau routier était à la base même du désenclavement du Sahara. Les premiers efforts pour y faciliter la pénétration automobile remontaient à 1932[28], date à laquelle la piste Touggourt-Ouargla avait bénéficié d’un revêtement à liant hydrocarboné supportant jusqu’à 80 °C. En 1945, il existait au Sahara un réseau de 12 000 kilomètres de mauvaises routes et de pistes que la Direction des Travaux publics d’Algérie entreprit d’améliorer et d’étendre à partir de 1953. Trois ans plus tard, le Sahara disposait de 831 kilomètres de routes nationales dont 382 étaient bitumées, de 12 516 kilomètres de routes secondaires dont 530 étaient bitumés[29], et de 13 350 kilomètres de piste sans revêtement ni aménagement. Le réseau s’organisait en trois grandes pénétrantes, appelées d’abord « routes impériales », devenues par la suite « routes transsahariennes » et se dirigeant vers le Sud, ainsi que des pistes transversales les reliant entre elles. Si le trafic était resté stable de 1945 à 1952, avec environ 45 000 tonnes de marchandises annuellement importées[30], celui-ci s’intensifia avec les travaux de prospection puis d’exploitation et le développement de l’activité économique. En 1958, 250 000 tonnes de marchandises entraient au Sahara par la route[31]. À partir de 1955, les pouvoirs publics lancèrent un important programme routier quinquennal que l’OCRS poursuivit. Il permit jusqu’en 1960, d’améliorer et rénover 8 650 kilomètres de pistes anciennes, d’en créer 1 025 kilomètres supplémentaires et de construire 1 752 kilomètres de routes modernes[32] pour un montant de 30 milliards d’anciens francs.

Le trafic aérien avait également connu un essor avant même la naissance de l’OCRS. Dès 1948, les aérodromes sahariens furent répertoriés et, à partir de 1951, la compagnie nationale Air France assura une desserte régulière des plus importants d’entre eux. En 1952, un plan d’amélioration des installations aéroportuaires fut lancé, car en raison des coûts de construction et d’entretien d’une route saharienne, celui d’un aérodrome demeurait moins élevé. Il pouvait aussi être rapidement opérationnel à un moment où les équipes de prospecteurs et de pétroliers essaimaient. Si bien qu’en 1959, il existait dix-huit aérodromes de classe  B et six de classe C[33]. Les aéroports de classe B permettaient d’accueillir des gros-porteurs DC4 ou Bréguet-deux-ponts d’un rayon d’action de 3 000 kilomètres et d’un poids pouvant atteindre 60 tonnes au décollage ; ceux de classe C étaient accessibles aux avions de moins de 20 tonnes, en règle générale pour des liaisons internes au Sahara. En 1961, alors que les pouvoirs publics tablaient sur une augmentation du trafic de passagers, comptant notamment sur les fonctionnaires et les touristes, les premières pistes reçurent des installations pour des mouvements de nuit. En comparaison, ce fut l’infrastructure ferroviaire qui fut la moins développée au Sahara. L’OCRS par exemple ne parvint pas à se convaincre de la nécessité de réaliser le « Niger-Méditerranée », dont le projet remontait au xixe siècle. Selon les experts, la densité des échanges entre l’Algérie et l’Afrique noire ne permettait pas d’amortir la construction d’une telle ligne qui aurait mobilisé des moyens techniques et financiers considérables, ce qui au passage démontrait que le Sahara n’était finalement pas la plaque tournante d’une communauté française vivante. Pourtant, à défaut d’une justification économique, celle-ci aurait eu une utilité sociale en soutenant le développement de la partie occidentale du Sahara algérien qui, sans renfermer des gisements d’hydrocarbures, n’en était pas moins la plus peuplée. Le morcellement politique du Sahara au début des années 1960 mis un terme définitif au projet. On peut raisonnablement penser qu’avec quelques années de plus, l’OCRS eût été conduite à reconsidérer ses calculs de rentabilité pour le transport de la production agricole en pleine expansion, dont les fameuses dattes Deglet-en-nour.

Si une amélioration de l’agriculture saharienne fut possible, elle le doit aux travaux d’hydraulique menés à partir de 1959. L’OCRS consacra 1,5 milliard d’anciens francs de crédits de paiements cette année-là, somme qui fut portée à 9,1 milliards l’année suivante et à 7,05 milliards en 1961. La recherche de l’eau avait toujours été une priorité pour les pouvoirs publics sans que les moyens financiers suivent. En 1956, à Tamerna, confirmant les travaux de Savornin et Gautier, les pétroliers tombèrent fortuitement sur la nappe albienne et virent jaillir 12,5 mètres cubes d’eau à la minute. À partir de janvier 1958, la construction de la route stratégique du Gassi Touil[34] nécessita la réalisation de cinq forages aquifères entre 200 et 1 200 mètres, produisant quotidiennement les 400 mètres cubes d’eau indispensables au compactage des matériaux. Mais ces résultats étaient encore modestes au regard de ce qui fut bientôt obtenu du sous-sol saharien : le 23 décembre 1959, la Compagnie métropolitaine et africaine de forage faisait surgir, non loin de Touggourt, 23 mètres cubes d’eau à la minute puisés dans la nappe albienne, par 1 500 mètres de profondeur. Et en quinze mois de prospection, les services de l’hydraulique de l’OCRS parvinrent à faire sortir 130 mètres cubes d’eau à la minute dans l’ensemble du Sahara représentant 400 millions de tonnes par an. Dans un deuxième temps, l’OCRS projeta la construction de barrages en complément de la vingtaine déjà existant à Gherza, El Fatha ou du Rocher du Sel pour les plus importants. L’idée, déjà ancienne, d’une retenue sur l’oued Guir, au nord d’Abadla fut relancée[35]. Cet ouvrage devait permettre l’irrigation de 30 000 hectares dans une région particulièrement pauvre. L’indépendance de l’Algérie mit un terme au projet.

Grâce aux efforts déployés pour augmenter la ressource en eau, la surface agricole s’était accrue de 20 % en 1960[36]. Toutefois, en dépit des crédits d’équipements, de formation professionnelle, de perfectionnements techniques et de choix des semences, la production n’avait pas augmenté de manière vraiment significative lorsque l’OCRS disparut en 1962. En 1957, le Sahara algérien comptait 24 000 hectares de terres cultivables qui ne suffisaient pas à nourrir la population[37]. Environ 5 millions de palmiers dattiers produisaient 600 000 quintaux de fruits, dont 70 % de dattes ordinaires[38], élément nutritif principal des populations sédentaires et nomades. En 1959, les départements des Oasis et de la Saoura produisaient 35 000 quintaux de blé dur, 42 000 quintaux de blé tendre et 46 000 quintaux de seigle[39], ce qui nécessitait d’importer 220 000 quintaux pour couvrir les besoins. Une grande partie de ces cultures céréalières et légumineuses était réalisée directement sous les palmiers, sous forme de jardinage. La valeur globale de cette production se maintint à un peu plus de 3 milliards d’anciens francs entre 1956 et 1961[40]. En 1956, le revenu agricole était assuré pour l’essentiel par les dattes, avec 2,3 milliards d’anciens francs. En 1960, la production de dattes représentait la même valeur - dont 1,2 milliard dû aux 19 000 tonnes des fameuses deglet-en-nour - et 2,5 milliards en 1961[41]. Les pouvoirs publics fondaient beaucoup d’espoir dans la plantation de palmiers dattiers. Alors que 20 000 plans avaient été mis en terre en 1955 et 1956, 106 000 le furent entre 1957 et 1960. Un hectare de palmiers dattiers nécessitant 25 mètres cube d’eau par an, l’OCRS pensait pouvoir en planter encore 100 000 de plus tous les ans grâce aux forages de la nappe albienne, soit 1,8 million de plus d’ici 1965. La Caisse d’accession à la propriété et à l’exploitation rurales[42] (CAPER) saharienne avait établi dès le milieu des années 1950 que l’attribution d’une exploitation de 0,75 hectare, comptant 96 palmiers produisant 45 kilogrammes de fruits chacun, assurerait à 40 000 familles bénéficiaires[43], soit 200 000 Sahariens, un revenu annuel de 230 000 anciens francs permettant de vivre décemment tout en remboursant les investissements en vingt-cinq ans[44].

Des exploitations de ce type furent créées pour 80 familles à Ghamra en 1957, pour 80 familles à Hobba en 1958, pour 70 familles à El Harihira en 1959, pour 250 familles à Zelfana en 1959-1961, pour 320 familles à Tamerna entre 1958 et 1960 - 32 000 palmiers dattiers sur 410 hectares. Toutefois, cette entreprise toute théorique, se heurtait à un certain nombre de difficultés comme le manque de jeunes palmiers en état d’être plantés et le manque d’ingénieurs techniciens et moniteurs agricoles pour encadrer des familles inexpérimentées alors qu’un palmier dattier qui nécessite des soins permanents contre les parasites et les maladies, ne devient productif qu’après huit ans[45]. Cette absence de compétences était évidente. Les « Secteurs d’amélioration aurale » voulus par l’OCRS étaient loin d’être généralisés. En 1961, le département de la Saoura, s’étendant sur 780 000 kilomètres carrés, ne comptait que deux ingénieurs agricoles et quatre techniciens de l’agriculture. En outre, la plantation d’un « second étage » de végétation de type arbres fruitiers dut, en certains endroits, être reportée en raison de la trop forte salinité des sols et seules quelques cultures maraîchères furent mises en exploitation. Cette monoculture du palmier dattier n’allait pas sans susciter des inquiétudes. Fin 1961, la plaquette du Service d’information du ministère d’État chargé du Sahara et de l’Outre-mer établissait un bilan prudent de l’agriculture saharienne, soulignant que

les plantations de palmiers dattiers ne cessent de s’étendre. L’effort entrepris favorise aussi les autres cultures : arbres fruitiers (abricotiers et poiriers), vignes à raisin de table, céréales, légumes - les tomates et les courges. Aucun problème ne semble devoir se poser pour l’écoulement de leurs produits qui servent surtout au ravitaillement local. Il n’en est pas de même pour les dattes, principale production du Sahara.[46]

Le système qui devait, à terme, donner un niveau de vie décent à un tiers de la population saharienne, apparaissait menacé par des problèmes d’écoulement des récoltes et de chute des cours avant même d’avoir atteint son plein développement. Dans le même temps, des améliorations furent apportées à la valeur de l’élevage et à la production de viande. En 1956, ceux-ci représentaient respectivement 6,81 et 1,36 milliard d’anciens francs, obtenus par un élevage extensif tributaire de l’état des pâturages, eux-mêmes dépendant du rythme des pluies. L’augmentation des points d’eau et donc des « terrains de parcours » des quelque 200 000 nomades sahariens, porta à 7 milliards d’anciens francs la valeur de cet élevage en 1958 lequel comptait alors 420 000 moutons, 350 000 chèvres, 137 000 chameaux et 1 200 bœufs[47]. L’agriculture et l’élevage étaient naturellement subventionnés, comme l’était du reste le secteur primaire métropolitain : en 1960, le gouvernement accorda une aide d’un montant de 233,6 millions d’anciens francs aux sociétés agricoles sahariennes de prévoyances[48].

Dès sa création, la raison d’être de l’OCRS était le développement économique et la promotion sociale des Sahariens. S’agissant dans un premier temps de mettre en place l’infrastructure de base indispensable au décollage économique du Sahara, la manne financière fut d’abord consacrée aux travaux d’équipements. Les dépenses de travaux publics pour les années 1958-1959 s’élevèrent à 26,3 milliards d’anciens francs[49]. Après deux ans et demi d’efforts, il devenait temps de faire bénéficier plus directement les populations de ce plan. Un arrêté de mars 1959, favorisa l’exécution des interventions financières propres à assurer la promotion sociale des populations[50], plaçant désormais la vocation sociale avant le développement économique. Cette réorientation se traduisit par une affectation différente des crédits. Si, en 1959, 17 % avaient directement profité aux populations, cette proportion passa à 53 % l’année suivante. Des progrès sensibles se firent par conséquent rapidement ressentir. Ainsi, la production d’électricité, qui plafonnait à 7 130 millions de kilowattheures en 1957 avait plus que doublé au 1er janvier 1961, avec 18 330 kilowattheures et le nombre d’abonnés, qui était de 9 630, était passé à 16 130 à la même date. En 1962, grâce à l’agrandissement de la centrale de Touggourt, 25 000 Sahariens supplémentaires devaient avoir accès à l’électricité, symbole de modernité. Le secteur de la santé était également emblématique des efforts de la France au Sahara. Fin 1961, les deux départements sahariens disposaient de 101 postes de secours, de 20 infirmeries dispensaires et de 15 hôpitaux comptant 900 lits couvrant les principales spécialités médicales. D’autre part, un arrêté de juin 1959 instituait 13 centres d’action sociale ayant vocation d’enseigner les règles d’hygiène et de dispenser une formation médico-sociale[51]. Ces structures étaient complétées par des centres de solidarité féminine, plus particulièrement destinés à favoriser l’émancipation des femmes. Leur nombre passa de 25 en 1959 à 60 en 1960. L’autre domaine d’action retenu par les pouvoirs publics passait par l’éducation de la jeunesse. En 1959, 15 000 enfants fréquentaient l’école, soit guère plus de 10 % des 130 000 enfants en âge d’être scolarisés. À la rentrée scolaire 1960, 25 000 enfants étaient scolarisés et 33 310 l’étaient un an plus tard. Des centres de formation professionnelle furent en outre créés. Alors qu’il n’en existait que quatre depuis le début des années 1950, le Sahara en comptait dix fin 1961, les pouvoirs publics espérant ainsi résorber un chômage important en orientant les Sahariens vers les métiers déficitaires. Ces efforts s’accompagnaient, pour assurer la promotion de la main-d’œuvre saharienne, de la création d’un salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) spécifique à ces deux départements. Enfin, il ne pouvait y avoir de promotion sociale sans une amélioration de l’habitat. À ce titre les pouvoirs publics avaient pensé à promulguer un code de l’Urbanisme, encore à l’état de projet lorsque l’Algérie acquit son indépendance. Quant au décret du 30 mars 1961, il donna naissance à deux offices du logement qui reçurent mission de bâtir 1 000 logements individuels d’ici 1965[52].

Au printemps 1961, alors qu’il était définitivement acquis à l’idée d’une Algérie indépendante, le général de Gaulle espérait encore ménager un destin séparé pour le Sahara. Il donna des instructions en ce sens à Louis Joxe, pour conduire les négociations de la première conférence d’Évian[53]. Par ailleurs, le Conseil des ministres du 22 mai 1961 adopta un projet de loi-programme de développement social du Sahara pour la période 1961-1965, doté de 13,749 milliards d’anciens francs[54], venant en supplément des 30 milliards d’anciens francs déjà programmés pour la période 1963-1965[55]. Ce plan quinquennal prévoyait par exemple la scolarisation de 35 000 enfants supplémentaires, la création de 840 nouvelles classes primaires et de 780 postes d’instituteurs, la construction de cinq collèges d’enseignement secondaire de 500 places chacun et l’ouverture de 62 sections de formation professionnelle des adultes et d’une école d’infirmières à Laghouat. Ce plan programmait également l’électrification de toutes les oasis de plus de 1 500 habitants. Il prévoyait d’ouvrir 140 nouvelles infirmeries dispensaires et d’abaisser le ratio de lits par habitants de 750 à 300[56] par la création de quatre grands hôpitaux à Laghouat, Ouargla, Touggourt et Colomb-Béchar, représentant un total de 1 100 lits. Le Sahara appelait donc des investissements supplémentaires. Si jusqu’en 1959, la France avait alimenté le budget de l’OCRS par des subventions prélevées sur le budget national, Paris disposait à partir de 1960 du produit de la redevance et des impôts pétroliers pour les financer[57]. Le délégué général de l’organisation le confirmait publiquement[58]. En revanche, les pouvoirs publics demeurèrent plus discrets sur le prix de revient de la tonne de pétrole saharien, dont l’extraction était deux fois plus chère qu’une tonne de pétrole extrait au Moyen-Orient[59]. Les risques pris par les compagnies, même si la majeure partie des investissements était d’origine publique, avaient d’ailleurs justifié une fiscalité favorable. Mais en contrepartie, la France entrevoyait de disposer d’une indépendance énergétique presque complète jusqu’à ce que l’énergie nucléaire prenne le relais de l’énergie pétrolière à l’horizon 1985-1990. Bien évidemment, l’indépendance de l’Algérie, le 19 mars 1962, contrecarra cette ambition. D’autant que la rédaction du code pétrolier, extrêmement précise quant aux fonctions de contrôle de la puissance publique, permit aux autorités algériennes d’exercer rapidement leur souveraineté sur l’industrie pétrolière une fois l’indépendance acquise.

L’action de l’OCRS bénéficia donc, dans l’ensemble, au jeune État algérien. Mais cette opération de développement d’un désert absolu et aussi vaste qui était une première, alors même que les problèmes humains étaient d’une extrême complexité, avec l’opposition entre nomadisme touareg et sédentarisme mozabite pouvait-elle sortir ses habitants des conditions d’existence précaires qu’ils connaissaient depuis des siècles ? Pendant cinq ans, c’est-à-dire de 1957 à 1962, l’OCRS a poursuivi simultanément deux buts. Le premier, d’ordre économique, était de mettre en place une infrastructure de transport susceptible d’attirer des industries extractives et de transformation et de créer une agriculture pouvant assurer l’autosuffisance pour les populations locales. Le second était la promotion sociale des Sahariens. De ce point de vue, il était difficile de concilier une politique sociale performante et le respect des traditions et du droit coutumier. Le développement d’une agriculture capable de satisfaire les besoins des populations sahariennes se heurta d’ailleurs à un système féodal de la propriété du sol, des arbres et de l’eau. Sans doute parce que l’OCRS eut comme règle intangible de respecter les traditions et coutumes de sa zone d’intervention, aucun remembrement ne fut mené à bien. D’autre part, comme cela avait déjà été le cas un demi-siècle plus tôt, l’exode d’une partie des agriculteurs se rendant sur les chantiers d’infrastructure et pétroliers, désorganisa la vie des palmeraies en laissant une nouvelle fois les systèmes d’irrigation à l’abandon. La politique d’industrialisation montra aussi rapidement ses limites. Certes, la période initiale des grands travaux d’infrastructure permis l’embauche d’une main-d’œuvre nombreuse et peu qualifiée. Mais à l’exception faite d’une raffinerie qui commença à fonctionner à partir de juin 1961 à Hassi-Messaoud, les industries de transformation ne vinrent pas s’implanter comme les pouvoirs publics l’avaient espéré. L’espoir de pérenniser 25 000 emplois dans l’industrie pétrolière, faisant vivre 125 000 Sahariens, apparu beaucoup trop optimiste.

Alors que l’OCRS disparaissait du fait de l’indépendance de l’Algérie, que les subventions pour de nouveaux chantiers se tarissaient, le devenir de ces ouvriers sahariens occasionnels se posait. Car l’éclatement de la vie tribale et la sédentarisation des populations pastorales laissait entrevoir le renforcement d’un prolétariat de mécontents « sociologiquement désintégrés »[60], préexistant à l’OCRS. Ce constat permet de dire que l’OCRS n’a que partiellement atteint l’objectif qui lui était assigné, notamment faute de temps. Quelques mois avant l’indépendance de l’Algérie, le ministère du Sahara prophétisait sans illusion que « dans dix ans le Sahara continuera à coûter plus cher qu’il ne rapportera »[61]. Si donc la promotion des populations fut une réalité dans des domaines comme la santé et l’éducation, si les Sahariens accédèrent à la démocratie en élisant leurs députés et sénateurs, leurs conseillers généraux et municipaux, au moment de la dissolution de l’OCRS, les oasis demeuraient des îlots de sous-développement au milieu d’étendues désertiques. Toutefois, il faut dire également que l’OCRS ne fut pas un système d’exploitation de type colonialiste puisque la France, après avoir assumé ses deux premiers budgets (1958 et 1959)[62], puis la moitié de celui de 1960 pour une mise en valeur rapide du Sahara, avait bien abandonné le produits des impôts et redevances apportés par l’exploitation du sous-sol au bénéfice de l’Algérie et du Sahara.


[1] Jean Vidalenc, « La France et le bloc africain 1830-1934 ». In Christine Lévisse-Touzé, Romain Raindo et Claude Quétel (éd.), Actes du 4e colloque international d’histoire militaire. Ottawa, 1979 (3e édition), 361 p., p. 33.

[2] Frédéric Médard, « La France et la question saharienne ». Décolonisation décolonisations. Caen : Éditions du Mémorial de Caen, 2001, p. 244. Ce n’est qu’en 1947 que les Territoires du Sud furent placés sous administration du gouvernement général de l’Algérie. Article 50 de la loi n° 47-1.853 du 20 septembre 1947 « portant statut organique de l’Algérie », Journal officiel de la République française (JORF), 21 septembre 1947, p. 9470.

[3] Mais ce n’est que le 7 avril 1934 que le Sahara fut totalement pacifié et sous contrôle : à cette date, des colonnes venues du Sud Algérien, du Sud Marocain et de l’Afrique occidentale française se rejoignirent à Bir Morghren, une oasis située à 500 kilomètres au sud de Tindouf.

[4] En 1954, la densité moyenne de population dans les oasis atteignait 1 200 habitants par kilomètre carré. Gouvernement général de l’Algérie (GGA), Le Sahara, terre stérile, désert entre les déserts. Paris : Imprimerie G. Lang, 1957, 40 p., p. 4.

[5] Soit 60 % de la population saharienne en 1957. Ibid, p. 4.

[6] Seuls les Mozabites du M’Zab, où les Français s’implantèrent à partir de 1885, disposaient d’une hydraulique développée.

[7] Jacques Savornin, « Le plus grand appareil hydraulique du Sahara (nappe artésienne dite de l’Albien) ». Travaux de l’institut de recherches sahariennes. Alger : Institut de recherches sahariennes, 1947, p. 25. Marcel Gautier, Données sur l’hydrologie algérienne. La ressource aquifère du bassin du Chott Chergui. Alger : Imbert imprimeur, 1952, 11 p.

[8] GGA, op. cit., p. 6. Un nouveau recensement fut réalisé en 1958-1959. Il établit que 582 542 personnes, hors militaires, résidaient au Sahara, dont 81 000 semi-nomades, agglomérés pour la plupart autour des oasis. Arrêté portant « résultats du dénombrement de la population dans les départements des Oasis et de la Saoura », JORF, 13 octobre 1960, p. 9363.

[9Travaux de l’institut de recherches sahariennes. Alger : Institut de recherches sahariennes, t. XV, 1er semestre 1957.

[10] Article premier, loi n° 57-27 du 10 janvier 1957, JORF, 11 janvier 1957, p. 578.

[11] Décret du 13 juin 1957, portant « nomination des membres du gouvernement ». JORF, 14 juin 1957, p. 5923. En juin 1960, Olivier Guichard devint délégué de l’OCRS mais sans être ministre du Sahara. Décret portant « nomination du délégué général de l’Organisation commune des régions sahariennes », JORF, 11 juin 1960, p. 5265. Par cette décision, qui était accompagnée de quatre autres décrets signés le même jour (n° 60-536, 60-537, 60-538 et 60-539), le gouvernement entendait « dépolitiser » l’OCRS en recentrant l’action vers les seules compétences économiques et sociales.

[12] GGA, op. cit., p. 3.

[13] L’article 2 de l’ordonnance n° 59-228 du 4 février 1959 limita la zone d’intervention de l’OCRS à ces deux départements. JORF, 7 février 1959, p. 1685.

[14] Les cercles administratifs ne furent remplacés par des sous-préfectures que le 1er janvier 1961.

[15] C’est en qualité de secrétaire général du Protectorat du Maroc qu’il créa en 1929 le Bureau de recherches et de participations minières (BRPM). Cet organisme accueillit une pépinière d’ingénieurs qui élaborèrent les bases des diverses méthodes de prospection

[16] Le gisement d’Edjeleh fut découvert en janvier 1956, celui d’Hassi-Messaoud en juin 1956.

[17] GGA, op. cit, p. 11.

[18] Selon une carte parue dans la Revue militaire d’information, 25 mars 1956, n° 269, p. 2, reproduite fin 1956, RMI, novembre 1956, n° 278, p. 38.

[19] Charles-Robert Ageron, « L’opinion française à travers les sondages ». La guerre d’Algérie et les Français. Paris : Fayard, 700 p., p. 32.

[20] Le déficit atteignait 215,2 milliards d’anciens francs en 1953, 150,6 milliards d’anciens francs en 1954 et 86 milliards d’anciens francs en 1955. Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), Études et conjonctures. Juillet 1955, n° 7, p. 645.

[21] Centre historique des archives nationales, série F 60 3 046 à 3 052. Comité d’études des zones d’organisation industrielle de l’Union française (Comité Labonne) et bureau des zones d’organisation industrielle africaine. Centre des archives de l’outre-mer, série 6 EVEOM, 1-13. La ZOIA n° 1 couvrant l’extrême Ouest algérien, l’extrême Est marocain et le Nord-Ouest du Sahara algérien, la ZOIA n° 2 couvrant l’Ouest tunisien, l’extrême Est algérien et le Nord-Est du Sahara algérien.

[22] Pierre Sevette, L’économie de l’énergie dans les pays en voie de développement. Paris : PUF, 1963, 249 p., p. 117.

[23] Le « vide », en arabe.

[24] Ordonnance n° 58-1248, du 18 décembre 1958, relative aux sociétés sahariennes de développement. JORF, 19 décembre 1958, p. 11428.

[25] La CFS était née en 1957 de l’association de vingt-trois grandes banques françaises.

[26] La SDRS est créée en 1959 par l’association de la Banque de Paris et des Pays-Bas et de sociétés françaises d’assurances.

[27] Décret n° 55-876 du 30 juin 1955, relatif aux sociétés de développement régional. JORF, 2 juillet 1955, p. 8340. Arrêté du 7 octobre relatif aux conditions d’application du décret du 30 juin. JORF, 8 octobre 1955, p. 9910.

[28] Ces aménagements intervenaient dix ans après que la « Croisière noire Citroën » a relié Alger à Gao.

[29] Sur les parties non bitumées de ce réseau, le sable était maintenu latéralement. Un autre procédé consistait à stabiliser chimiquement le sable dans la partie supérieure des coches de base grâce à l’emploi du « lignosulfite » qui permettait de doubler la résistance à la pression importante des convois routiers qui commençaient à sillonner le Sahara et d’augmenter la résistance à la dessiccation et, dans certaines parties, au lessivage des eaux pluies.

[30] Sur un total de 100 000 tonnes entrées au Sahara cette année-là. Claude Treyer, Sahara 1956-1962. Paris : Société les Belles-lettres, 1966, 205 p., p. 105.

[31] Sur un total de 560 000 tonnes importées. Ibid.

[32] Service d’information du ministère d’État chargé du Sahara et de l’Outre-mer, Sahara. Nancy : Berger-Levrault, 3e trimestre 1961, 43 p., p. 20.

[33] « Sahara 1959 ». Industries et Travaux d’Outre-Mer, juin 1959, n° 67. Cette publication ne faisait pas mention de l’aéroport ultra-secret de Reggane. Frédéric Médard, « Le Sahara enjeu scientifique et technologique 1947-1967 ». Militaires et guérilla dans la guerre d’Algérie. Paris : Éditions Complexe, 2001, 561 p.

[34] Pour l’évacuation des productions d’Hassi-Messaoud et d’Edjeleh.

[35] Avant la création de l’OCRS, un autre projet concernait l’oued M’Zi. GGA, op. cit., p. 11.

[36] Service d’information du ministère d’État chargé du Sahara et de l’Outre-mer, op. cit., p. 17.

[37] GGA, op. cit., p. 10.

[38] Institut de recherches sahariennes (IRS), « Revenu agricole du Sahara 1956 ». Alger : Université d’Alger, 1959.

[39Ibid. La production était respectivement de 23 000 tonnes pour le département des Oasis et de 10 000 tonnes pour le département de la Saoura.

[40Ibid.

[41] Service d’information du ministère d’État chargé du Sahara et de l’Outre-mer, op. cit., p. 17.

[42] Décret du 26 mars 1956. Créé au départ pour l’Algérie du Nord, l’action de cet établissement public doté de l’autonomie financière et de la personnalité civile fut étendue au Sahara.

[43] La CAPER privilégiait les petites palmeraies et l’exploitation familiale à une exploitation communautaire, estimant que cette dernière ne correspondait pas à l’individualisme musulman.

[44] Institut du développement africain (IDEA), Développement africain. Monographie de la CAPER. 1959, numéro spécial, Alger.

[45] Dans ce laps de temps, les familles touchaient une allocation annuelle de 10 000 anciens francs.

[46] Service d’information du ministère d’État chargé du Sahara et de l’Outre-mer, op. cit., p. 17.

[47] IRS, op. cit.

[48] Service d’information du ministère d’État chargé du Sahara et de l’Outre-mer, op. cit., p. 17.

[49] C. Treyer, op. cit., p. 90.

[50] Arrêté du 7 janvier 1959, relatif aux « interventions financières de l’Organisation commune des régions sahariennes », JORF, 14 janvier 1959, p. 877. Cette idée est reprise en des termes plus précis encore dans un décret de juin 1960, lequel évoque dans son article premier toutes les mesures destinées « à élever le niveau de vie des populations sahariennes ». Décret n° 60-537 du 10 juin 1960 relatif à l’« organisation commune des régions sahariennes », JORF, 11 juin 1960, p. 5263.

[51] Arrêté du 9 juin 1959, portant « création de Centres d’action sociale dans chaque cercle administratif des départements sahariens », JORF, 10 juin 1959, p. 5579.

[52] Décret portant « suppression de l’Office interdépartemental d’habitations à loyer modéré des Territoires du Sud et création de deux Offices départementaux pour les départements de la Saoura et des Oasis », JORF, 5 avril 1961, p. 3318.

[53] Jean Lacouture, De Gaulle. T. III : Le souverain. Paris : Seuil, 1986, 865 p., p. 185.

[54] Loi programme du 27 mai 1961 relative « au développement de l’action sociale dans les départements des Oasis et de la Saoura », JORF, 28 mai 1961, p. 4829.

[55] 30 milliards avaient été investis pour la période 1960-1962.

[56] Ce qui aurait alors donné au Sahara « un équipement hospitalier proportionnellement identique à la métropole ». Service d’information du ministère d’État chargé du Sahara et de l’Outre-mer, op. cit., p. 43.

[57] En octroyant, comme le prévoyait le code pétrolier saharien (constitué par les ordonnances n° 58-1111, 58-1112 et 58-1113 du 22 novembre 1958 et le décret d’application n° 58-1159 du 2 décembre 1958), 60 % de cette manne à l’OCRS, 25 % à la Caisse saharienne de solidarité et 15 % à la Caisse d’équipement de l’Algérie. Le gaz saharien devait servir au financement du plan de Constantine.

[58Le Monde, 11 février 1961. Cet apport était de 5,5 milliards d’anciens francs, contre 31 milliards provenant du budget français en 1960 puis de 125 milliards contre 275,5 milliards en 1961. Grâce à l’augmentation de la production (en 1961, 16,6 tonnes de pétrole et 217 millions de mètres cubes de gaz furent extraits du sous-sol saharien et 20,5 tonnes de pétrole et 277 millions de mètres de cubes de gaz en 1962, année de l’indépendance de l’Algérie), les autorités entrevoyaient une augmentation de la rente.

[59] Ce que démontrait déjà un rapport de Georges Goetze, PDG de la Société nationale de recherches et d’exploitation pétrolières en Algérie (SNREPAL), le 15 octobre 1959.

[60] C. Treyer, op. cit., p. 163.

[61] Service d’information du ministère d’État chargé du Sahara et de l’Outre-mer, op. cit., p. 43.

[62] Le budget de l’OCRS dépendait du budget du ministère du Sahara.


Citer cet article :
Frédéric Médard, «  Le Sahara, 1957-1962 : mutation administrative, économique et sociologique  », colloque Pour une histoire critique et citoyenne. Le cas de l’histoire franco-algérienne, 20-22 juin 2006, Lyon, ENS LSH, 2007, http://ens-web3.ens-lsh.fr/colloques/france-algerie/communication.php3?id_article=245